Les littoraux, zones sensibles à aménager
Jean Baptiste Noé
9 mars 2020


Ce solide ouvrage richement documenté, apporte une foule de connaissances portant sur les littoraux du monde où se concentrent une part grandissante de la population et des activités économiques de la planète.


Si les océans constituent 70,8% de la surface du globe et que le commerce maritime couvre 80% du commerce mondial, c’est bien à partir des ports de commerce que se déploient ces activités. Une véritable science des littoraux s’est donc constituté au fur et à mesure de la montée de la littoralisation du monde, les géographes ont élaboré des indices de littoralité qui mesurent les flux de matières d’énergie et de populations qui convergent vers les zones côtières provenaient de l’hinterland. 680 millions de personnes vivant près d’un littoral situé à moins de 10 m d’altitude, ils seront 1 milliard en 2050. D’où l’approche intégrée que nous offrent les auteurs, Nassima Kacimi Zeggaï, docteur en géographie, ingénieur en aménagement du territoire, chargée de cours à l’université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yveline et Raymond Woessner, professeur honoraire de Géographie à la Sorbonne, directeur de la belle collection de Géographie des éditions Atlande.

L’étude des littoraux relève du droit depuis l’ouvrage Mare liberum de Hugo Grotius paru en 1609 jusqu’au Traité du droit de mer de Montego Bay adopté en 1982. Elle a été prise largement en compte par la géopolitique de l’océan global qui a développé les concepts de Thalassocratie, seapower (amiral Mahan) de Seepolitk. Si l’occurrence des batailles navales paraît faible depuis la guerre des Malouines en 1982, entre l’Argentine et la Grande-Bretagne, ce qui n’empêche pas de nombreuses provocations voire escarmouches dans les zones de tension (Golfe arabo- persique, mer de sud méridional, Méditerranée orientale). Lorsque l’on observe la montée des forces navales des puissances installées ou émergentes, notamment pour ce qui concerne les porte-avions, les États-Unis viennent de commander le plus grand du monde, devant coûter 12 milliards de $, on mesure l’importance des ports militaires, des bases navales, des divers points d’appui.

Cet ouvrage, outre qu’il décrit le phénomène côtier dans ses dimensions morphologiques, géologiques, géographiques décrit en détail la gamme très riche des activités économiques ou de tourisme et de loisirs qui se déploient sur les côtes. Pêches et ressources halieutiques, migrations, énergies marines, exploitation des hydrocarbures qui représentent plus du tiers de la production mondiale. Large place est accordée à la délicate question de la délimitation et de la répartition des espaces maritimes. Le récent accord de répartition maritime entre la Turquie et le gouvernement de Tripoli de M. Sarraj a montré l’acuité de ces questions où s’opposent Turquie, Chypre, Liban, Israël et le gouvernement palestinien, qui non reconnu a du mal à faire valoir ses droits et laisse un espace à ses 4 000 pêcheurs.

Les lecteurs trouveront des développements finis sur bien des aspects, zones de pêches exclusives (ZPE), aires maritimes protégées (AMP), les zones principales d’exploration pétrolière et gazière offshore (golfe du Mexique, Nigéria, Angola, Arctique, Qatar). Notons d’intéressantes remarques sur l’énergie nucléaire et les littoraux. Une description approfondie des ports et façades littorales comme systèmes territoriaux. Puis la moitié de l’ouvrage décrit les différentes façades portuaires  les plus marquantes, qui ont joué et continuent à jouer un rôle parfois vital dans le développement des divers pays : Japon, Hong- Kong et Singapour, deux hubs, Indonésie, l’État-archipel la rente de Panama, les EAU, du néant à la mondialisation, l’Amérique atlantique, la problématique géopolitique russe, qui a de difficiles accès aux « mers chaudes », Chine et son collier de perles et ses routes de la Soie maritime. Enfin le cas de la France qui possède la deuxième ZEE mondiale (11,3 millions de km²) est abondamment traité. 

Nassima Kacimi Zeggaï et Raymond Woessner, Les littoraux dans le monde, Atlande, 2019, 256 pages.